dimanche 1 février 2009

Comment j'ai fait mes premiers pas dans le Véganisme

1/ Durant les 20 premières années de ma vie, je ne me préoccupe pas de ce qui se trouve dans mon assiette. Je mange du "blanc de poulet", du "steak", des tranches de "jambon", du "foie gras". Pour moi ce n'est que des mots ainsi donnés à de la nourriture. Je ne me pose pas plus de question que cela, et pourtant j'aime les animaux ! J'aspire depuis toute petite à devenir vétérinaire, je récupère toutes les petites bêtes blessées à la maison, hérissons, pigeons, crapaud, mais au niveau de la bouffe, rien, et c'est pas que je veuille fermer les yeux sur la réalité hein. mais rien.

Bon, on sait tous qu'on mange des animaux. Mais ça va pas plus loin que ça. Quand on mange "des particules de nerfs, de tendons, de vaisseaux sanguins ou d'os* mêlées à de la chair animale broyée, le tout, inséré dans un boyau (naturel ou synthétique)", on mange de la saucisse, on banalise, on sait même plus ce qu'on bouffe putain et moi ça m'énerve ! je rappel quand même qu'un boyau c'est ça et c'est par là que circule la bouffe digérée, (la merde quoi soyons direct ^^ ), par les porcs. pouah ! *(les saucisses industrielles sont faites avec de la viande désossée mécaniquement, donc un peu de tout se retrouve dans les saucisses,miam)

Le rapport que l'on a vis à vis de la nourriture n'est plus le même. Ce qu'il a dans votre assiette , c'est tout bonnement, de la chair animal. C'est pas simplement un aliment comme le sont les lentilles, le pain, les oranges ! C'est le résultat de la séquestration d'un être vivant, de sa mise à mort, et de l'étalage de sa chair dans le rayon viande de carrefour.
Les gens ne font plus le rapport entre l'animal vivant, et le steak dans leur assiette, et ça, c'est grave.


2/ Puis après mon BAC S, je suis admise à l'institut universitaire et technologique de périgueux, en filière agricole, pour deux ans. Visite de ferme d'élevage, d'abattoir, on étudie à peu près tous les systèmes agricoles. Entre les deux années, on effectue un stage obligatoire en exploitation. J'ai donc écris le pavé qui va suivre y'a quoi.. 1an et demi presque, à la sortie du stage :


"J'ai décidé de rédiger ces lignes pour faire part de mon ressenti, je trouve important de montrer la réalité telle qu'elle est. Ouvrir les yeux, et enfin comprendre dans quel monde nous évoluons, c'est le travail que chacun d'entre nous devrait faire...

"- En tant qu'étudiant en génie biologie, option agronomie, vous devez, pour valider votre diplôme, effectuer un stage de huit semaines en exploitation agricole...
- Un stage de huit semaines ? En exploitation polyculture élevage oui... Qu'est ce que l'on va bien pouvoir faire dans une ferme ? Soigner les bêtes, donner du foin, pailler les boxes, des trucs de fermier quoi..."

Arrivée à la gare, on passe me chercher en voiture. Trente-cinq minutes plus tard, on arrive sur l'exploitation : des parcelles à perte de vue, un soleil éblouissant les champs de colza dans un décor magnifique, pâturages verts et ciel bleu... Un beau commencement... Mais je suis loin d'imaginer ce qui m'attends...

On me présente à la famille et aux personnes travaillant ici. Tout le monde est très accueillant, je me sens bien et je me dis que je vais passer un bon séjour en leur compagnie. Logée, nourrie au sein même de l'entreprise, je vais passer huit semaines immergée dans le monde agricole, dont je n'ai vraiment aucune connaissance. C'est une découverte, je suis alors encore "omnivore" et je suis à des années lumières de la vérité...

Le troupeau de chèvres laitières

Un troupeau de deux cents chèvres laitières attend dans la stabulation. Je suis extasiée devant toutes ces bêtes. Insouciante fille de la ville, je me réjouis pour la première fois d'aller faire la traite, pouvoir les voir de près, les toucher, les caresser...
Les bêtes défilent sur des quais. Elles sont à notre hauteur. On leur applique à la main des gobelets trayeurs. Pendant la traite, on leurs donne du grain pour les distraire. Elles sont toutes conditionnées à cette tâche quotidienne : entrer sur le quai, passer la tête entre les cornadis (deux barres de fer pour avoir la tête maintenue), manger, attendre, et ressortir..

Quelques unes sont quand même apeurées avec le bruit de la trayeuse, les chiens qui aboient... J'essaye d'en maintenir une qui manque de tomber du quai. Elle réussit à s'enfoncer un clou dans la paupière et elle force dessus pour s'échapper. De mon côté, j'essaye de lui enlever, mais elle a peur, et tire sa tête... Enfin elle s'en décroche, et passe sa tête dans les cornadis et mange... Je n'ose même plus la toucher, je me sens coupable de ce qui lui est arrivé...Puis une autre chèvre a ses cornes coincées dans les cornadis. Je m'en vais pour l'aider, car ayant réussi à passer sa tête, elle pouvait aisément la repasser une seconde fois. Mais j'arrive trop tard, un apprenti brandit une paire de cisailles et s'acharne sur les cornes de la pauvre bête qui se débat comme elle peut, la tête coincée dans les cornadis : écornée à froid. Je suis écœurée et je pars pleurer derrière le hangar. Comment peut-on faire une telle chose ? Il n'avait pourtant pas besoin de faire cela ! Que voulait-il me démontrer ?

L'abattoir et la viande

Régulièrement, plusieurs chèvres partent à l'abattoir, et "reviennent" en morceaux dans des caissons isothermes. La viande est ensuite travaillée sur l'exploitation pour l'élaboration de produits transformés. Je n'ai pas accepté de rentrer dans les locaux de l'abattoir, je ne voulais pas voir cela. J'aurais peut-être dû maintenant que j'y repense, je n'étais pas encore végétarienne à l'époque, cela m'aurait peut-être plus vite décidé.
J'ai mis mes mains dans la chair, j'ai découpé des lambeaux, j'ai trié des poumons et des cœurs, et tout ça sans vraiment être dégoûtée, il fallait le faire, alors je l'ai fait, sans me poser de questions...

Le passage au végétarisme

Les jours passent. Je m'occupe des chèvres, je fais les traites, le paillage. Parallèlement, je me renseigne énormément sur Internet, sur les conditions de vie des animaux dans les élevages industriels, sur le végétarisme. Je lis des témoignages, et petit à petit, j'ouvre les yeux. Je découvre de plus en plus de choses incroyables que je n'imaginais même pas. Comment la viande arrive dans mon assiette, les conditions pitoyables des poules de batterie, pourquoi boire le lait d'une autre espèce, comment peut-on continuer à tester des cosmétiques sur les animaux, alors qu'il existe des équivalents tout aussi cher non testés... Mais aussi la fabrication du cuir et le mode d'obtention de la laine m'interpellent.
Du jour au lendemain, j'ai un déclic, et cela deux semaines après mon arrivée à la ferme.
J'annonce la couleur. On me dit, que je ne vais jamais tenir, que ce n'est qu'une passade, une lubie. Je suis nouvelle dans le monde du végétarisme, pour moi, quinoa, tofu, seitan et autres aliment peu communs, ne me disent rien.

Il m'est dur de satisfaire à mon alimentation végétarienne au cours du stage en ferme : pas beaucoup de légumes, et beaucoup de pâté, rillettes, pot au feu, cassoulet aux repas. Je fais comme je peux, et je suis incomprise par les gens de la ferme, par leur amis qui viennent. On me rit au nez, je me fais toute petite. Baisser la tête... et se taire.

Le lait de chèvre

Les naissances ont lieu. Deux cents petits sont arrachés à leur mère, parqués dans des boxes trop petits. Je n'ose plus entrer dans la stabulation. Je ne veux pas voir tout cela.Les chevreaux sont nourris au biberon, et quand ils ont deux mois, ils sont emmenés à l'abattoir par lot variant de cinq à dix individus.
Deux mois seulement... deux mois sans marcher, sans courir... deux mois à chercher la lumière, l'air et crier quand une ombre passe. Beaucoup de corps s'entassent, maladie ou faiblesse de naissance, certains se laissent mourir, comme s'ils savaient qu'il n'y avait rien à espérer. Aucun espoir, la mort est inévitable.

Les chevrettes, elles, rejoignent le troupeau des chèvres laitières, et donneront, à leur tour, naissance à un ou deux petits l'année suivante. Les chèvres sont jetées à l'abattoir à l'âge de trois ans, remplacées par du "neuf", quand on sait qu'une chèvre peut vivre jusqu'à l'âge de quinze ans...tout ça pour le profit, ne pas prendre en compte les intérêts de la chèvre à vivre, l'achever alors qu'elle entre à peine dans sa phase "adulte ", seulement parce que elle ne rapporte plus assez ??

Je m'interroge alors sur le lait. L'être humain est le seul mammifère à boire le lait des autres animaux. Il est également le seul à continuer à boire du lait après son sevrage. Le lait n'est pas adapté à l'alimentation humaine, c'est un fait que les grandes firmes contredisent pour continuer à se faire du profit sur notre dos.
De plus, en raison de nos méthodes modernes d'élevage, le lait est devenu un vrai concentré d'antibiotiques et d'hormones administrés aux animaux, ainsi que de substances chimiques utilisées pour traiter leurs aliments.

L'exploitation possède aussi des vaches à viande. Je me souviendrai toujours de ce jour-là, le jour où il a fallu enfermer un taureau dans un fourgon pour le mener à la mort. Une bête magnifique, jeune, une robe dans les marrons avec des dégradés de noir. Insouciante, elle s'est gentiment laissé conduire, je l'ai regardé dans les yeux, et je me suis retenu de pleurer, « désolé », j'ai murmuré, « désolé ».


Fin de stage

Enfin les huit semaines sont achevées. Je reviens dépitée, mais je ne me laisse pas abattre pour autant. Les jours passent et je me rends compte que finalement, s'il n'y avait pas eu ce stage, je ne me serai peut-être jamais posé ces questions, ou peut-être pas tout de suite.

Avec le temps, je diversifie mon alimentation. Je comprends que les protéines ne sont pas uniquement présentes dans la viande, que le lait n'est pas le seul à contenir du calcium, et qu'il faut alterner oléoprotéagineux et légumineuses. Je bois encore du lait et je mange encore des œufs, le manque de Vitamine B12 me fait peur.

Mon entourage accepte mon végétarisme. Je deviens de plus en plus forte aux pressions et remarques extérieures. Je me dis que de toutes façons, je sais que j'ai raison, qu'ils ne cherchent pas à comprendre et que tant qu'ils ne voudront pas ouvrir leur esprit sur ce sujet, ils n'avanceront pas.

Alors maintenant j'ouvre ma gueule, je ne me laisse plus marcher sur les pieds. Je suis fière d'être ce que je suis, de ce que je suis devenue, et pour rien au monde je ne changerai.
Je vais peut-être, à de nombreuses reprises, devoir supporter des remarques désobligeantes, et alors ?

Baisser les yeux et se taire... Plus jamais !"

7 commentaires:

  1. hop premier commentaire pour la petrolette, du très très bon ces articles!
    vu que je t'ai mis en lien tu vas pas tarder à te récupérer tous les gros relous d'anonymes qui mettent des commentaires bidons sur mon blog par contre!
    :p

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  2. ahah c'est bon je peux faire face aux gros relous ! :p merci !!

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  3. seitan,tofu, quiquoa "ne me disait pas grand chose"
    J"ai 17 ans et j'en suis là comme etre sur d'eviter les carences en proteines es qu'il y a d'autres produits d'origine VG qui aporte de qu'ils faut en protides ?
    (je suis du genre maigre 53kg 1m78 j'ai vraiment pas besoin de perdre, je suis un mec.... )
    merci, j'ai pas trop le temps de divaguer sur des forums a la con.

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  4. "D'autres produits d'origine végétales qui apporte ce qu'il faut en proteine"

    Je suis en train de faire un article sur "Comment bien se nourrir quand on est VG"
    Tu sais des proteines, il y'en a partout, je vais pas développer ici dans les commentaires car je le ferais dans mon prochain article, mais Sache qu'il faut faire l'association " céréales + légumineuses " Les acides aminées et tout le tralala ce complétent et y'a pas de carences possibles. C'est peut être "un peu laborieux" de faire des recherches sur internet, d'aller sur des forums ou autre, mais c'est là que tu trouveras une mine d'infos à ce sujet !

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  5. J'aime beaucoup la façon dont tu écris, c'est agréable de te lire.
    Si tu me le permet, je rajoute ton lien sur mon site :)

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  6. pas de problème ! je t'ai rajouté aussi ;)

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  7. Bonsoir, je suis tombée sur ton site par hasard et j'en suis très heureuse.
    J'ai laissé un commentaire sur ton article sur la fourrure, assez violent d'ailleurs, je ne sais pas s'il sera accepté mais toujours est-il que j'étais moi aussi à côté de la plaque. J'aime les animaux plus que tout au monde et j'ai sourit lorsque tu racontais que tu ramenais toutes les petites bêtes en détresse chez toi afin de les soigner, hérisson, oiseaux, chat, insectes, je me suis également improvisée véto plus d'une fois et ai aimé passionnément tous les animaux que j'ai eu, je les respecte tellement.. j'ai horreur de la fourrure et pourtant lorsque l'on me répond "oui mais tu manges bien de la viande" je n'ai qu'un seul argument "le sacrifice de l'animal n'est pas inutiles dans ces conditions et de toute manière même si je m'en privais, est ce que l'on arrêterait de tuer des animaux pour les manger ? Non...", je viens de comprendre avec effroi et les larmes aux yeux que je faisais partie de ces petasses qui se mentent à elles mêmes et qui participent au fait que rien ne change et que les animaux continuent de souffrir, pour nous, enfoirés d'humains, je savais (bien sûr je n'avais pas vu les images, mais je savais....)que tout n'était pas rose dans les abatoires, mais j'adore manger, c'est un de mes plaisirs principaux dans la vie et je ne sais pas cuisiner alors un steack aché c'est pas bien compliqué et c'est tellement bon ... tu qualifiais les gens qui savent et qui continuent "d'égoïstes", je suis entièrement d'accord avec toi, en me remettant en question, je sais ce qu'il se passe mais je préfère oublier parce que j'aime trop la bonne boufe, je suis une putain d'égoïste et de focus ! mon dieu...merci, tu vois je vais faire 20 ans le 23 mars et tu viens de me convertir en végétarienne ou je ne sais pas trop quoi, je jure de ne plus manger de viande, ca va être très dure, surtout que j'ai un rapport assez spécial avec la nourriture (par exemple, si je mange quelque chose qui ne m'a pas plut, je vais être de mauvaise humeur et je vais remanger quelque chose qui me plait dans l'heure qui suit) mais si je prétend aimer les animaux je dois le prouver et les aimer jusqu'au bout. Chaque fois que je fantasmerai sur un steack charal à l'oignon (mes préférés) je me remémorerai ces images atroces. C'est grâce aux personnes comme toi que les choses progressent, merci.

    Maeva.

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